Carrere

Emmanuel Carrere

Un roman russe

POL

Un roman russe, malgré son titre, n’est pas un roman. C’est un objet
assez difficile à définir d’ailleurs, récit intime, journal de voyage.
Plusieurs histoires ici sont racontées. Le premier récit évoque des
voyages, des reportages dans la Russie d’aujourd’hui. Pour Carrère,
c’est l’occasion d’un retour à ses racines russes. Fils de
l’académicienne Hélène Carrere d’Encausse, l’auteur est le petit fils de
Georges Zourabichvili, émigré russe, sombre personnage qui collabora
avec les nazis et disparut à la Libération. Sur lui, silence radio dans
la famille. Pour le redécouvrir, l’auteur redécouvre sa culture et sa
langue, russes, et pour ce faire quel meilleur moyen que ces voyages
dans la Russie profonde. Le second récit traite de sa passion pour
Sophie, désirée, aimée puis detestée.

On aimera ce livre pour la description époustouflante d’une Russie de
province, et de la petite ville de Kotelnich, univers à la Dostoievski,
monde de poésie, de sauvagerie, d’amour et de rage, d’indolence et de
violence. Carrère tente sans doute de nous parler ainsi de cette espèce
de fatalité à la russe qui pèse aussi sur la famille Carrère, cette
sorte de malédiction du malheur, de pesanteur suicidaire.

Le deuxième récit est donc l’évocation d’une passion amoureuse violente,
avec une formidable charge libidinale, l’histoire d’un couple qui finira
par se détruire.

D’Emmanuel Carrere, né en 1957, retenons notamment : « La moustache »,
1986, récemment adapté au cinéma avec Lanvin, histoire d’un homme
déboussolé par le regard des autres ; « L’adversaire », récit
documentaire sur la tragédie de ce faux docteur de l’OMS à Genève, qui
trompe les siens sur son statut professionnel pendant des années et qui
choisit de les tuer plutôt que d’avouer, un texte adapté au cinéma par
Nadine Garcia.



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