Brisac

Geneviève Brisac

52 ou la seconde vie

Olivier

Un recueil de nouvelles, 52 nouvelles pour les 52 semaines d’une année,
autant de morceaux de mosaique ou de pièces d’un puzzle et à l’arrivée
un roman éclaté mais un roman tout de même.

Ce sont toujours des femmes qui parlent ici, à tour de rôle, à 52
reprises ; elles s’appellent Akka, Nouk, Carlotta, Mélissa, Rétsiné,
Tova, Mona ; elles sont pédiatre, professeur de russe, écrivain ou
employée de bureau. De quoi parlent-elles ? De tout et de rien, d’amour
et de politique, de maternité et de guerre, de Garcia Lorca et de Rosa
Luxemburg, de fille muette et de tombes à deux places, d’un général
tortionnaire, de l’enfance, de la vieillesse, de nostalgie politique,
des problèmes de création, de petites anecdotes et de grandes idées. Ces
petites choses qu’on appelle les petits riens.

Par exemple Nouk qui prend un taxi ; le chauffeur lui parle de
Baudelaire, elle hésite, il continue et ils finissent, le temps de la
course, par rebaptiseer le nom des rues. Ou encore : ce vieillard
courtois croisé au pressing, poli, attentionné ; la narratrice le revoit
le soir à télé : c’est général Aussaresses, bourreau en Algérie. Ou :
Melissa qui rêve d’arrêter de fumer ( très drôle). Ou : Nouk qui perd sa
bague bleue et triche pour ne pas attrister son compagnon en bricolant
un faux saphir ; elle sera bien punie, finalement.

Par petites touches, voici des portraits de femmes, leur quotidien, la
poésie d’un instant. Alors, la seconde vie ? Comme dit la 4 de
couverture, c’est « cet espace où nous passons la majeure partie de
notre existence, où le dedans et le dehors, l’intime et le politique ne
cessent de se mêler ». Brisac dit encore : on est amphibies, d’ici et
d’ailleurs, les pieds sur terre et la tête dans les rêves comme un arbre
déraciné immergé dans le flot de nos fantasmes et utopies.

Elle a d’ailleurs placé en exergue ce conseil de Virginia Woolf : « 
Observez perpétuellement, observez l’inquiétude, la déconvenue, la venue
de l’âge, la bêtise, vos propres abattements, mettez sur le papier cette
seconde vie qui inlassavblement se déroule derrière la vie officielle,
mélangez ce qui fait rire et ce qui fait pleurer. Inventez de nouvelles
formes, plus légères, plus durables ».

Il y a là des styles et des genres différents, un vrai début de récit,
des contes, une sorte d’histoire pour la jeunesse, bref un roman
polyphonique.

Ce roman, comme toute l’oeuvre de Brisac, est le travail d’une feministe
(je recommande particulièrement le chapitre sur la femme artiste,
l’invisibilité de la femme artiste).

Elle a travaillé chez Gallimard, puis a été critique au Monde des
livres. Editrice à l’école des loisirs, elle a eu le Femina en 1996 pour
« Week end de chasse à la mère ».



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