L’enjeu des médias

Que faire face à une information dominante et uniforme ? Qu’est ce que
le droit à l’information ? Comment redonner vie au pluralisme ?
Entretien avec Jean-François Tealdi, journaliste, syndicaliste de
l’audiovisuel public, coordinateur du Front de gauche / Médias.

Q : Le Front de gauche a édité un quatre pages intitulé « Pour une
appropriation populaire des médias ». Peux-tu nous présenter ce document ?

R : Il nous semble, au Front de gauche, que la question des médias, de
son pluralisme est une question déterminante, qui doit être prise à bras
le corps par la future majorité de gauche qu’on espère. Les propositions
qui figurent dans ce 4 pages sont issues avant tout du travail mené
depuis 2002 par la commission Médias du PCF, l’essentiel est repris dans
ce texte ; il y a eu mise en débat de ces idées avec nos partenaires,
échanges, amélioration. Ce qui concerne les coopératives, les SCOP par
exemple, ça vient de nos partenaires du PG. Cela a donc débouché sur ce
texte et on a bien l’intention de nourrir le débat avec ces pistes, qui
prennent en compte tous les médias, la presse, de la fabrication (
renouveau industriel, impression, etc) jusqu’à la diffusion, la question
des aides, le pôle public audiovisuel, la construction d’un conseil
national des médias avec représentation des syndicats, des usagers.
C’est l’ensemble des médias audiovisuels et de la presse qui est
concerné par ce travail.

Q : Les rencontres sur les médias se multiplient ; il y a eu notamment la
rencontre de Malakoff, le 1er février dernier.

R : J’ai participé à deux rencontres différentes. Il y a eu la réunion de
Malakoff qui a été un succès, plus de cent personnes, avec un public de
militants, qui connaissaient déjà nos propositions, les gens d’ACRIMED,
des syndicalistes de TDF, de France Télévision, de l’Audiovisuel
extérieur, des ouvriers du livre, un public averti et un débat pointu
sur les propositions. Les syndicalistes CGT étaient fortement
représentés et ont repris à leur compte l’idée de renationaliser les
opérateurs de télécom. Et il y a un autre type de rencontres, dans les
fédérations, où s’organisent des débats autour du film de Yannick
Kergoat, « Les nouveaux chiens de garde ». Le public est différent, des
gens qui en ont ras le bol du manque de pluralisme dans les médias, qui
veulent que ça change et qui cherchent comment faire. Le plus souvent,
ils ne connaissent pas notre programme et la diffusion du 4 pages (
ainsi que nos interventions dans le débat) suscite beaucoup d’intérêt et
reçoit un très bon accueil. Des choses se font à Nice, à Marseille, à
Manosque, à Draguignan, à Paris, à St Nazaire, à Nantes ; la
mobilisation prend forme, on peut marquer des points, faire bouger les
lignes. J’ajoute que si on compare le programme du Front de gauche et
celui du PS sur les médias ( on a notamment débattu ensemble à la Fête
de l’Humanité), il n’y a pas photo. Le PS a peu travaillé ces questions.
Il y a débat à gauche, et on arrive à faire bouger ce parti sur cet
enjeu des médias. Je veux encore dire qu’on prépare un appel de
professionnels de la presse et des médias pour appuyer nos propositions
et faire voter Front de gauche.

Q : La candidature du Front de gauche reste très discriminée. Voir les
chiffres du CSA. Que faire ?

R : Les chiffres sont là. Il y a près de 40 heures, en janvier, pour le
PS et l’UMP, et 2 ou 3 heures pour le Front de Gauche. Le CSA commence à
se manifester mais on sait bien qu’on ne pourra pas rattraper le retard.
On a connu ce genre de déséquilibre en 1995 (Balladur), en 2005 (le oui
européen), en 2006 et 2007 (l’omniprésence de Sarkozy et Royal). Le non
respect du pluralisme est un vrai problème. Que faire ? Il faut déjà que
les citoyens se manifestent auprès des rédactions de la presse écrite ou
de l’audiovisuel. Dans un deuxième temps, si la gauche gagne, les
parlementaires du Front de gauche porteront cette réforme du CSA, avec
la création du conseil national des médias, doté de vrais pouvoirs
d’intervention. Le CSA aujourd’hui a peu de pouvoirs et il n’utilise
même pas ceux qu’il a ! Il faudra que ce Conseil national à venir se
charge, lui, de faire respecter vraiment le pluralisme.

Propos recueillis par Gérard Streiff



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