2004 (3e trimestre)

*Mouvement des idées*
Note n°78 (2/7/04)

1)Droite : une double communication ?

Tout se passe comme si, depuis quelques jours, dans le débat public, les
luttes internes à la droite s’accompagnaient d’une double communication
du pouvoir : sociale avec Borloo ( et Douste ?), libérale avec Sarkozy
(les 35h, les classes moyennes). La spirale libérale est évidente, le
message dans l’opinion l’est moins. Ratisser large ou déboussoler les
siens ? Le thème du « tournant social » agace, à droite ; c’est le « 
retour au vocabulaire des années Jospin » regrette Le Figaro dont
l’éditorialiste estime qu’on va ainsi « troubler à droite sans
convaincre à gauche ».
Le Monde exploite ce thème du désarroi à droite avec un papier sur la
difficulté de l’UMP à recruter dans l’intelligentsia malgré les efforts
de sa fondation (2/7).

2)Débat mondial sur la croissance

Alors que Sarkozy-Raffarin évoquent volontiers les chiffres d’une future
relance, les titres de la presse économique sont plutôt récessifs : « La
croissance revue à la baisse aux Etats-Unis » (Figaro économie 26 juin) ;
« Les patrons allemands pessimistes pour 2005 » (même source), etc…Mais
c’est surtout la qualité de la croissance qui est en débat.
Voir par exemple, dans le Figaro Eco du 30 juin p IV, le débat
(électoral) aux Etats-Unis mêmes sur une croissance qui génère peu
d’emplois et des emplois de qualité médiocre. Kerry fait campagne sur « 
le thème du déclin économique et industriel américain nourri par la
délocalisation des emplois vers l’étranger ».
Délocalisations, dumping social : Multiplication d’exemples – et
d’articles- sur le chantage patronal à la délocalisation (pression sur
les salaires, les conditions de travail, les horaires).
Vers la relance du débat contre les 35 heures dans ce cadre.
Mise en place à Rennes autour de STMicroelectronics d’un « collectif
national contre les licenciements et pour le droit à l’emploi ».

3)Le parti américain

Multiplications d’articles, tribunes et ouvrages prônant, peu ou prou,
un rapprochement franco-américain : long article de Balladur dans Le
Monde du 26/6 sur « l’indispensable alliance » ; ouvrage d’Alexandre
Adler, « L’odyssée américaine », qui « démen l’ambition impériale » des
USA (dixit Duhamel).
Sans parler de Sarkozy qui se flatte de ses amitiés américaines.

4) Vote utile, bipartisme : état des lieux

Intéressante étude d’un universitaire et d’un cadre de l’IFOP sur la
manière dont le PS a agrégé des voix aux européennes. De la gauche au
CPNT. Elle ne se prononce pas toutefois sur la « qualité » de ce vote :
antidroite, d’adhésion, durable ?
Le Figaro du 2/7, p 7

5)Nouvelle époque

Résumé par G. Urbani, l’idéologue de « Forza Italia », le parti de
Berlusconi, du changement d’ère : en 1993, à la fondation du parti, « on
était influencé par la chute du communisme, par le livre de Fukuyama sur
l’avènement linéaire du développement ». Dix ans plus tard, « la
globalisation a abouti à un monde asymétrique dans lequel le
développement est lui aussi asymétrique ».
(Le Monde, 26 juin).

6)Journalisme

Le rôle des journalistes dans le traitement de l’affaire Battisti en
France est systématiquement soulevé par les personnalités qui s’engagent
là. Fred Vargas fait de la désinformation la colonne vertébrale de son
livre pour Battisti ; Sollers au théâtre de l’œuvre, samedi dernier,
qualifie les journalistes de « flics ». (A ce propos on notera les
efforts d’Ariane Chemin du Monde pour minorer ou effacer la place des
communistes dans cette campagne).
Vive tension entre manifestants et correspondants de presse.
Désinvolture des gens des médias lors des audiences du tribunal, se
contentant de l’argumentaire de l’accusation.
Commentaires nombreux sur la réorganisation en trompe-l’œil du service
des Informations à France2.
Voir aussi la tribune de Téaldi (SNJ-CGT) dans L’Huma (2/7) sur « droit
à l’information, droit des journalistes ».

7)Démocratie, autoritarisme et développement

Étude de la PNUD (branche de l’ONU pour le développement) sur l’Amérique
latine montrant que ces vingt dernières années, si les dictatures ont
reculé, « à l’euphorie a succédé l’amertume » et selon une étude
récente, près de 55% des latino-américains accepteraient le retour à un
régime autoritaire pour peu qu’il améliore leur situation économique ».

8)Culture

Remous persistants dans l’intelligentsia sur l’attitude du président de
région Languedoc-Roussillon, G. Frêche, fermant le centre régional des
lettres et ses propos sur la « déviance morale » et ceux « qui méritent
d’être fusillés ».
Papier de Christian Salmon dans Libération du 1/7 sur le « capitalisme
culturel », l’emprise des milieux d’affaire sur la culture, le « 
McDonald » culturel en place en Europe.

9)Rêver à un autre monde

Papier du philosophe Bernard Stiegler, « De la croyance en politique »
(1/7) sur la crise de la politique, la question de la croyance, proche
de notre thème du « rêve d’un autre monde », Le Monde 1/7

10) Partis

PS : séminaire sur la réforme des institutions (Le Monde, 29 juin) ;
papier du Nouvel Obs du 24/6 sur les rapports PS/ATTAC au titre
significatif « La guerre est finie ».

Fondations : article du philosophe « patronal » François Ewald sur les
fondations politiques dans les Echos du 15 juin

*Mouvement des idées*
Note n°79 (9/7/04)

1) Harcèlement libéral

A lire la presse généraliste ou spécialisée, impression d’une surenchère
de la rhétorique libérale ces derniers temps, d’une expression sans
partage de cette idéologie dans les médias, comme indifférente au climat
politique et aux résistances de toutes sortes.
A longueur de colonnes, en cette fin d’année scolaire, on salue
l’efficacité de l’école privée, on fustige les 35 heures, on évoque le
statut de la Sncf après celui d’Edf, on exalte les délocalisations, la
flexibilité, le tout-répressif, etc…
Comme si ce discours, hier l’apanage de la frange la plus libérale,
occupait tout le discours de droite, et au delà…
On retrouve la méthode du MEDEF : Seillère déclarait le 29 juin à La
Tribune : « La France doit être harcelée de réformes ».
Sur l’idéologie aujourd’hui, sortie du livre de Nielsberg et Spire à La
Dispute « L’idéologie toujours présente ».

2)35 heures

Pression accrue du patronat et des ultra-libéraux mais difficulté
persistante avec l’opinion. Un premier sondage Figaro/Ipsos confirme que
60% sondés trouvent que les 35h sont une « bonne chose ». N’empêche :
triturant les questions, le journal titre pourtant : « deux français sur
trois pour la réforme ».
Second sondage Parisien/CSA qui trouve 51% pour remettre en cause. Mais
45 ne le souhaite pas : cette opposition à une réforme des 35h est
réelle chez les cadres (50%), les ouvriers (51%), les jeunes (64% des
18-24 ans) et les proches du PC (97% !). A noter que les proches du PS ne
sont que 49% à s’opposer à une remise en cause…

3)Culture et engagement

Double page du « Spécial Avignon » du Monde du 3/7 sur
l’engagement plus marqué des pièces en Avignon cet été. La montée du
nazisme, l’Occupation, mai 68, la torture, la globalisation, autant de
thèmes proposés par des gens comme François Bon, Pippo Delbono, Claire
Lasne, Olivier Cadiot, Thierry Bédard, Rodrigo Garcia…
Une sorte de réponse encourageante au texte de Pierre Bourgeade dans le
dernier numéro des « Lettres françaises » : ce dernier regrettait le
conformisme des metteurs en scène ces deux dernières décennies.
Voir aussi les propos que tenaient Frank Castorf – qui ouvre le
Festival, in Aden du 10 mars : « Mes mises en scène traitent de la perte
du politique. Personne ne veut plus faire un effort pour changer le monde ».

4)PS partout ?

Dans le même temps où l’actualité montre plutôt un PS divisé sur nombre
de questions (constitution ; affaire Battisti ; culture et Frêche ; 35h),
les médias titrent plus volontiers sur la « combativité » de ce parti :
Le PS « fait front » (Le Monde), le PS « mobilise » (le JDD) :
multiplication de titres choc autour des seules déclarations du PS,
l’Opposition à sa Majesté.
Une médiatisation spectaculaire de sa réunion des élus à la Mutu le 3/7
par exemple.
A noter l’attitude de Kouchner face au plan Douste-Blazy, les positions
répétées de dirigeants socialistes en faveur de l’expulsion de Battisti
(Valls, Martinet) ; la présence de Védrine à la Fondation de l’UMP.

5)« Antiaméricanisme primaire »

L’air du temps serait à « un antiaméricanisme primaire » se plaint Le
Figaro (7/7).
Cela se semble pas être l’état d’esprit de certains journalistes qui ont
pris avec des pincettes le film de M.Moore : « simplisme et démagogie »
pour Le Monde ; « guéguerre » pour Le Figaro.
A noter une multiplication de papiers sur l’essoufflement de l’économie
américaine.

6)Insécurité

Surenchère médiatique dans la présentation de faits divers monstrueux.
Certes l’actualité semble justifier ces informations. En même temps, la
mise en scène d’infos sordides, le fait de privilégier le sensationnel
dans les journaux télévisés est devenue la norme dans l’audiovisuel
privé ou publique.
« La France a peur » semblent répéter ces médias, jouant de l’amalgame.
On pourrait parler aussi d’une mise en scène de l’inquiétude civique :
au fil des jours, on annonce un rapport « alarmant » de l’Education sur
le communautarisme à l’école, un rapport « inquiétant » des RG sur les
quartiers, des chiffres « inquiétants » du ministère de l’Intérieur sur
le racisme…
(Dans le même temps, peu d’infos sur l’insécurité sociale, le chômage,
les fermetures, etc…).

7)Ecole privée-école publique

Coup de pub très médiatisé pour l’école privée à partir d’un rapport du
Ministère de l’Education (!) sur les avantages comparatifs public/privé.
En fait le rapport montre surtout l’élitisme social du privé ; la grande
stabilité des rapports public/privé ; et contredit l’idée qu’il y aurait
une fuite du public vers le privé.

8)Paris-périphérie

Une réflexion utile sur Paris et la proche banlieue dans un entretien de
l’architecte Chemetov in Le Monde du 6/7 p 26.

9) Presse, édition, concentration

Nombreuses prises de position sur la recomposition du monde médiatique (
socpresse-figaro-tf1) et de l’édition ; rappelons que Wendel-Seillères a
désormais la haute main – entre autres choses- sur des éditeurs « 
progressistes » comme 10-18 ou La Découverte ; sur les manuels scolaires
comme Bordas ou Nathan et qu’il devient aussi l’éditeur de José Bové.

10)Partis

PS : Appel pour la Constitution Giscard de Delanoë et Strauss-Kahn in Le
Monde, 3/7. Mode d’emploi sur la réalisation de leur projet dans la
presse du 7/7 : commission de 140 membres (avec un secrétariat exécutif
non désigné) ; onze groupes thématiques (éducation, travail, solidarité,
développement durable) ; rencontre avec les syndicats et associations ;
réunions publiques dans les fédés. De septembre 2004 à janvier 2005,
diagnostic de la société ; propositions jusqu’en octobre 2005 ; synthèse
et vote des militants fin 2005.

UMP : Université des jeunes, 3/5 septembre, Haute Savoie ; congrès du
parti 28 novembre. Mode d’emploi de l’élection du nouveau président in
Le Figaro, 7/7.

UDF : pleine page de commentaires sur cette formation dans Le Figaro du
8/7 ; un « deal » Sarkozy/Bayrou à droite ?

Verts : congrès les 4 et 5 décembre à Reims.

FN : enquête du Monde sur les divisions internes dans Le monde du 3/7, « 
Querelles d’héritages an FN ».

LO/LCR : long écho sur les tensions entre les deux formations dans Le
Monde, 4/7, p 8 ; voir aussi Les Inrockuptibles, 1/7. Ainsi que le papier
de Bensaïd dans Libé du 8/7.

*Mouvement des idées*
Note n°80 (20/8/04)

1.
Un été de droite ?

Le cœur de l’été 2004 semble se résumer au triptyque : flic, fric,
racisme ; ces thèmes ont occupé presque tout le territoire médiatique.
Fric : explosion des profits, chiffres vertigineux de rentabilité exigée
des capitaux, brutalité des mesures libérales, chantages aux
délocalisations (35h, temps de travail).
Flic : omniprésence de la logique policière ( symptomatiquement, le mot
« police » était présent dans cinq des titres de « Une » de l’Huma début
août) ; regain du thème sécuritaire : fiches de dénonciation de
militants, violence, répression, arbitraires, etc…
Racisme : multiplication et mise en scène d’infos, certaines
mensongères, autour des questions du racisme, du communautarisme. Débat
vif dans le Monde après la tribune d’un psy (?) du 12/8 clamant sa « 
haine de l’islam » ; réponse notamment de notre ami Philippe Breton
(18/8) sur respect, dignité, humanisme.
Le contraste est saisissant avec l’été 2003, notamment marqué par la
lutte des intermittents et le rassemblement des altermondialistes.

2)Impasse démocratique et nouvelle propagande

Après deux consultations marquées par des condamnations sévères des
dérives libérales, on assiste sur un mode quasi provocateur à une
relance de l’ultralibéralisme et de ses « valeurs ».
Les pouvoirs en place semblent (en partie) conscients des risques d’un
tel « décalage » (le mot est du Monde). Aussi, outre l’aspect
directement répressif, assiste-t-on en même temps à un effort renouvelé
de « communication » pour tenter de vendre le libéralisme.
Cette double démarche est perceptible par exemple lors de la formation
de la nouvelle Commission européenne. D’un côté on pousse à un
ultralibéralisme pur et dur avec la nomination d’un personnel adéquat,
de l’autre on insiste beaucoup sur l’aspect crucial de la « 
communication » de la direction européenne afin de « se rapprocher avec
les citoyens » (Le Figaro du 13/8) ; le poste « communication » est magnifié.
Ce thème est aussi présent en France : Borloo va « vendre son plan de
cohésion sociale » dixit La Tribune (du 13/8) ; les Echos du 16/8 parle
de « bugs du logiciel démocratique »…
On avait déjà entendu ce discours après les élections : ce n’est pas la
faute de la politique de la droite mais du fait qu’elle « communique »
mal. Sarkozy pourrait surfer sur ce thème.

3)Médias en question

Pas étonnant dans ces circonstances si la question des médias, de leur
concentration, de la liberté d’expression, de la régression démocratique
dans ce secteur aussi est revenue si fort cet été. La communication au
service de la société marchande : autre thème dont on n’a pas fini
d’entendre parler, surtout après la déclaration, début juillet, de
Patrick Le Lay, pdg de Tf1 : « A la base, le métier de Tf1, c’est
d’aider Coca cola à vendre son produit en rendant disponible le cerveau
du téléspectateur à son message publicitaire ».
Le cinéaste Guédiguian dans une tribune libre du Monde, « Vive la télé
 », 10/8, a écrit un texte rageur à ce propos.
Le rôle des médias dans la campagne des européennes, dans la
(non)dénonciation du racisme, dans la mise en scène de la « mytho du RER
 », est souvent posé.

4) Propagande gouvernementale pour la Constitution

Au cœur de l’été, un long article du Figaro Economie (26/7, p VIII)
annonçait la préparation d’un vaste plan de communication du pouvoir en
faveur de la Constitution européenne, programmé dès octobre (le 29).
Cette campagne est « l’objet du plus grand soin » de l’Elysée, Matignon
et du Quai, dès à présent à la recherche d’une boîte de com’. Sont
prévus : une brochure, Internet, l’audiovisuel, notamment « des
programmes courts diffusés à des heures de grande écoute, avant le JT ».
Budget : 10 millions d’euros, trois fois le budget investi par le
gouvernement dans les dernières élections européennes.

5) Prochaines présidentielles à la télévision

Lié à ces enjeux, à lire l’info parue dans le JDD du 15/8 sur la
pression exercée sur les pouvoirs publics par un groupe de communiquants
et visant à recomposer la communication télévisée lors des élections
présidentielles, à transformer aussi l’émission « Expression directe ».
Il s’agit de publicitaires du collectif « Démocratie et communication »
qui entendent rencontrer Copé et Sarkozy. Idée : que l’Etat alloue 200
000 euros à chaque candidat à la présidentielle de 2007 pour réaliser
des films de com courts pour la télé, à diffuser aussi sur les chaînes
privées.
Pour rétablir le droit d’affichage. Pour des durées de campagne
officielle d’un mois. Pour sept heures d’antenne hebdo politiques.

6)Recomposition du capitalisme français

Quelques papiers sur ce thème : installation du modèle anglo-saxon,
pression des fonds d’investissements, patrons voyous, usines jetables,
liens maintenus ( voire renforcés) entre pouvoir politique et économique
(Chirac et Dassault), pouvoir économique et culturel (Seillères/ Wendel/
Editis), capitalisme de connivence. Cf Le Monde du 6/8 et du 17/8.
On trouve volontiers aujourd’hui dans la presse des mots dur sur ce
capitalisme. Laurent Mauduit dans Le Monde (17/8) reprend Marx pour
dénoncer « les eaux glacées du calcul égoïste » ; même le député UDF
Bourlanges condamne la commission de Bruxelles qui nous ferait passer « 
du bon vieux marché au libéralisme pur et dur ».
Comme si la rhétorique critique était aujourd’hui assez largement
partagée alors que manquent les propositions alternatives.

7) Identité française

Le Figaro a jugé utile d’entretenir pendant trois mois (mai/juillet) une
tribune de discussion consacrée à l’ identité française ; comme si la
droite avait besoin de reconstituer sa doctrine sur les questions Etat-
nation - Europe ; pas vraiment de conclusion tirée mais un papier final
d’un rédacteur, Jean de Belot (9/8), à la tonalité franchement
réactionnaire (anti-immigration, anti-Turquie, chrétienté), volontariste
( refuser le discours du déclin, ne pas rougir du passé), prônant une
recomposition complète de l’Etat (qui ne disparaît pas avec la
mondialisation mais doit changer). Pour un Etat fort ( gendarme, flic)
qui redéfinirait toutes ses fonctions ( au plan économique, se contenter
d’être un « Etat séducteur »).

8) Rentrée sociale

Plusieurs articles sur ce thème depuis la mi-août, dans la presse de
droite et économique. Une inquiétude de ces milieux : un certain retour
de la croissance pourrait favoriser les revendications en matière de
pouvoir d’achat. Avec un risque, toujours selon cette presse : que l’on
oublie « la racine du malaise : les 35 heures » (Echos, 16/8).
A noter cet été une série d’articles dans Le Figaro sur le mouvement
syndical ( état des lieux, comparatifs…).
Relance remarquée des médias des luttes sociales en Allemagne

9) Art et politique (autrement)

Assez bel écho à la sortie du nouveau film de Guédiguian « Mon père est
ingénieur » où le propos est directement politique et assumé comme tel
par le réalisateur. Double thème : restaurer des valeurs socialistes ou
antilibérales ET faire de la politique autrement. Bons papiers du Monde
et de L’Huma ; Le Figaro parle de « sentimentalisme idéologique ».

10)Partis

UMP : mise en scène durant tout l’été de la saga Sarkozy.
Scission de JL Romero qui crée « Aujourd’hui autrement ».

PS : cet été encore, seules ses prises de position ont eu droit de cité
dans les médias, comme si le PS résumait l’opposition.
En réelle difficulté sur la question du référendum ; nombreux indices
d’un penchant de la « base » pour le Non ou du moins contre le Oui (=
abstention ?) ; l’épisode de la formation de la nouvelle commission
(ultralibérale, effaçant à la fois la place de la France et des
socialistes-sociaux démocrates ) devrait aiguiser ce débat. Voir l’appel
des anti-oui dans Le Monde du 6 aout.

LCR : publication d’un entretien très personnalisé de Besancenot ; un
petit côté « anti-appareil », des allusions sur un climat difficile au
sein de la Ligue, sur des oppositions dites « générationnelles ».

Verts : Lemaire penche pour le Non sur la Constitution (17/8) ; vers un
référendum interne au premier semestre 2005. « Deux questions brouillent
tout chez les Verts, le voile et l’Europe » dit-il.
Position en pointe sur les OGM ; attitude politicienne au Parlement
européen ( se retrouvent avec l’UDF pour soutenir un libéral polonais ;
là aussi d’ailleurs on a retrouvé, chez Cohn Bendit, un discours « 
anti-appareil »).

LO : balancerait entre le Non et l’abstention sur la Constitution
européenne.

*Mouvement des idées*
Note n°81 (27/8/04)

1) Pouvoir d’achat, 35 heures

De nombreux dossiers sur la rentrée sociale, dans la presse spécialisée
notamment ; commentaires multiples sur les 35h, mais avec cette remarque
du JDD qui en fait son titre : « Personne n’est réellement prêt à abolir
la réduction du temps de travail. Pas même le Medef ».

Sondage début juillet CSA/Parisien : 51% pour renégocier, 45 contre.
Hyper-sensibilité du patronat sur la question du pouvoir d’achat.
Début de mise en scène de colère patronale ( « le patronat très remonté
 » dixit Les Echos du 23/8 sur la hausse du SMIC). La CGPME parle de
risque de « revirement » des entreprises à l’égard du pouvoir ; le MEDEF
parle de « traumatisme ».

2)Syndicalisme

Tribune libre d’Yvon Gattaz, ancien patron du CNPF, dans Le Figaro
intitulée « La fin des syndicats » (21/8) ; réquisitoire antisyndical ( « 
les performances des entreprises sont inversement proportionnelles à
leur taux de syndicalisation ») et surtout exposé des moyens pour
dépasser les syndicats : casser le collectif, atomiser par
l’individualisation ; ses mots clés : « le dialogue humain et
personnalisé », « le traitement personnalisé ». Conclusion : « Il est
temps de réorganiser en France le dialogue humain sans les syndicats ».
Michel Noblecourt dans Le Monde du 11/7 parle du « big bang du
syndicalisme international » et, le 20/7, procède à une longue analyse
de la « mue réformiste » des syndicats français.
René Mouriaux dans une tribune du Figaro (5/8) prècise des choses utiles
 : si le taux de syndicalisation est de 8%, il y a 65% de participation
aux élections des comités d’entreprise et 70% aux scrutins dans les
fonctions publiques.

3) Droite : réarmement moral et idéologique

On sent à différents signes que la droite se cherche une nouvelle
doctrine, de nouvelles pratiques, de nouveaux hommes. Ce phénomène
accompagne la montée en force de Sarkozy mais ne s’y limite pas. ( Il
est contemporain aussi de la mise à l’écart de Juppé et de sa ligne « 
centrale » ou centriste). La droite retravaille ses valeurs ( long débat
dans Le Figaro sur l’identité nationale ; début de production d’idées de
la Fondation de l’UMP) ; elle se montre moins consensuelle, plus
polémique. Un détail mais peut-être significatif : elle aborde ( Le
Figaro) de manière très agressive la rentrée littéraire, cassant sans
vergogne des auteurs ( l’américain Roth par exemple). Cette volonté
d’être plus « claire » figurait aussi dans le message adressé par
Dassault lorsqu’il a pris en main le Figaro.

4)« Nouvelle » social-démocratie française ?

Celle que définit Bernard Spitz, co-auteur avec Roger Fauroux de « Etat
d’urgence » (Laffont), dans une longue tribune de Libération le 23 août.
Rhétorique de centre-gauche et chapelet classique de politique libérale
sur la protection sociale, le service public, l’Etat-providence,
l’Education, la responsabilité individuelle, la fiscalité, le terrorisme…

5) Social-démocratie européenne

Beaucoup de papiers cet été sur Blair et les travaillistes ( et
l’arrivée de Mandelson à la Commission). Des choses connues, l’esprit de
lucre de ces nouveaux dirigeants ; l’explosion des inégalités ;
l’ultralibéralisme, l’atlantisme ; moins connue peut-être la face
répressive de ce pouvoir blairiste : surveillances systématiques,
tout-carceral, chasse aux pauvres…
« Allemagne, laboratoire social » : tout l’été, nombreux articles aussi
sur la crise sociale en Allemagne, l’hyper austérité en cours, les
tensions au sein du SPD, la réorganisation de la gauche allemande.

6)Etat-Chirac

Plusieurs dossiers cet été sur l’installation des fidèles aux
postes-cés, notamment Le Monde du 13 juillet.

7) Lourdes, le pape

Bilan plutôt mitigé dans les médias du passage du pape à Lourdes. La
mise en scène de la maladie papale a un double effet : compassion d’un
côté, mais aussi risque du « dolorisme » et image dégradée de l’Eglise.
Insistance des commentaires sur la faiblesse du propos : « Le chanteur
vaut mieux que la chanson » disent plusieurs papiers.
Côté très conservateur du culte ( de Marie), contesté de l’intérieur par
un ouvrage comme « Marie » de J. Duquesne (Plon).
Diatribe antiféministe du pape.

8)Rentrée littéraire : quelques essais et ouvrages politiques

1300 romans et essais prévus : 600 fictions, 700 documents !
Une trentaine d’ouvrages sur l’Amérique, plutôt de tonalité anti-Bush.
Mais aussi :
JJ Becker, Histoire des gauches en France, La Découverte
Jack Lang, Un nouveau régime politique pour la France, Odile Jacob
JC Cambadélis, Que faire au Parti socialiste ? CGM/Bruno Leprince
De Villepin, le Requin et la Mouette, Plon/Albin Michel
Et des livres annoncés de H. Gaymard, JP Chevènement, B Delanoe, L
Fabius, José Bové.

9) Hiérarchie des salaires

Nombreux dossiers sur les salaires des patrons ; aux Etats Unis, en
Europe ; alignement des méthodes françaises sur les américaines ; en
Allemagne, les salaires des patrons des grandes sociétés cotées valent
200 à 300 fois le salaire ouvrier.

10) Partis

PS : conseil national sur l’Europe le 9 octobre ; consultation des
militants à la mi décembre.

UMP : sa « Fondation pour l’innovation politique » a produit une note
sur le service minimum ; son auteur, l’universitaire F. Rouvillois, la
présente dans Le Figaro. Tout se passe comme si cette Fondation
entendait jouer un rôle dans les batailles d’actualité.

UDF : l’état des lieux à la rentrée, analyse de Libération du 19 août.

Démocrates américains : l’UMP et le PS étaient invités à la Convention
Démocrate de Boston (juillet).

Verts : le bilan de Lemaire in Le Figaro du 26/8 ; écho médiatique à la
proposition de marchandage de Cohn-Bendit (présidentielle contre
proportionnelle)

LCR : sa position sur l’Europe in la tribune de Ben Said dans Libération
du 8/7.

FN : divisions, suites : tenue de deux universités d’été, l’une,
officielle, à Enghien, l’autre à Orange.

*Mouvement des idées*
Note n°82 (2/9/04)

1)L’opinion, les salaires et les 35 heures

Sondage CSA/Le Parisien qui confirme le pessimisme massif des Français.
83% de sondés se disent inquiets, fatalistes ou révoltés.
Puisqu’il y a croissance, et donc cagnotte, deux sondés sur trois
(massivement à gauche, fortement à droite) plébiscitent une hausse du
pouvoir d’achat. Un tiers seulement parle de la réduction des déficits
Sondage Ifop/JDD du 29/8 : une majorité de Français, 56%, sont opposés à
l’abrogation de la loi Aubry sur les 35H dont 29% tout à fait opposés.
A l’inverse 43% des sondés y sont favorables (15% tout à fait et 28%
plutôt).
59% sont favorables à son assouplissement en échange d’une suppression
des allègements de charges sociales pour les entreprises.
Le JDD s’est livré à une petite manipulation dans la présentation du
sondage.

2) Débat sur les inégalités sociales

Un vrai débat engagé derniers mois experts sur définition pauvreté,
inégalités sociales
Diversification instruments mesure
Insee, très critiqué
« baromètre des inégalités et de la pauvreté » (bip40) du « réseau
d’alerte sur les inégalités » (rai)
les rapports de « observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion
sociales » (onpes)
débat très lié à mesure plus précise du pouvoir d’achat
Voir Mansour-Guilani Nasserin Libération du 26/8

3)Image dégradée du marché et de l’entreprise

Le ton énervé de Seillères à l’université d’été du MEDEF est une forme
de pression sur le pouvoir ; c’est probablement aussi un signe
d’agacement devant la dégradation de l’image de l’entreprise dans l’opinion.
A lire à ce propos la longue interview de Xavier Fontanet, pdg d’Essilor
et animateur du « comité d’éthique » du MEDEFdans les Echos du 30/8.
Face à l’entreprise les « anciennes incompréhensions » sont de retour,
dit-il ; sur la question du profit, il y a un « divorce » entre l’opinion
et les patrons ; reviennent des thèmes comme « l’exploitation du plus
grand nombre », « le profit est une horreur », « le marché est aveugle
 », le « client est manipulé », « le mot libéralisme est devenu difficile
à utiliser », etc… Des propos très défensifs, un plaidoyer pour les
vertus du marché, la concurrence ; il donne en modèle Singapour et
chiffre la sphère publique française à 55% de l’économie.
Même tonalité dans la tribune de Michel Pébereau dans La Tribune (31/8)
qui regrette cette contestation du marché en France avec ces formules :
 » La France est l’un des rares pays dans le monde – en tous cas seul
grand- où il existe encore un débat idéologique sur la caractère
incontournable du marché et de l’entreprise comme instruments du
développement économique et c’est une vraie faiblesse. Ce débat est
aussi étrange qu’un débat sur les thèses de Galilée pour savoir sui la
terre tourne bien autour du soleil. »

4) Le travail mis en scène

Il y a eu cet été le livre de François Bon sur la vie ouvrière mutilée
chez Daewoo, qui a donné lieu à une pièce à Avignon de Charles
Tordjmann. Critique très acerbe du roman dans le Figaro.
Il y a ce livre d’un(e) cadre d’EDF sur les conditions de travail, intitulé
« bonjour paresse » de Corinne Maïer chez Michalon.
Titre provocateur, livre moyen mais qui cristallise un ras le bol des
cadres, inquiète les directions et s’annonce comme un succès de librairie.

5) Croissance

Gros effort de propagande du pouvoir sur le thème de la croissance.
Raffarin se fend d’une longue tribune dans le Figaro du 28/8 avec un
seul message : on avait raison, on continue.

Le PS « prend » acte.
Un thème cependant à risques. La nature de cette croissance est
discutée, y compris à droite ; réticences des marchés financiers ; signes
d’essoufflement américains ; et débat collatéral cagnotte/salaire/.

6)Information et propagande

Un débat à présent récurrent sur les risques de manipulation de
l’information, sur les dérives dans le monde occidental. Edito très
inquiet des Echos du 27/8 « Dangereuse propagande » : « La démocratie
est en danger lorsqu’elle est polluée par la propagande cad le mensonge ».
Dans le même ordre d’idées, la sortie de Le Lay (« le métier de TF1,
c’est de vendre Coca Cola » et de travailler pour cela « les cerveaux »)
continue de faire des vagues ; Protestation et campagne de la SCAM,
Société civile des auteurs multimédia.

7)ANPE, quelle alternative ?

A partir des Etats généraux organisés par la FSU sur « ANPE : le service
public autrement », parution du livre « Politiques de l’emploi face aux
menaces libérales », collection « Comprendre et agir », sur la
privatisation de l’ANPE et les alternatives proposées. Parmi les auteurs
 : Castel, Dubar, Husson, Villiers.

8)Un capitalisme de progrès ?

Intéressant ouvrage de deux économistes, universitaires de Nanterre,
Aglietta et Rebérioux, très critique sur « les dérives du capitalisme
financier » (Albin Michel) et le pouvoir des actionnaires. Ce qu’ils
proposent comme alternative ? Une démocratie participative dans
l’entreprise qui doit être gérée « par l’ensemble de ses parties
prenantes » et une « gestion de l’épargne collective qui doit être
soumise à l’exigence démocratique » afin, disent-ils, de « remettre le
capitalisme contemporain dans la voire du progrès social ».
Un débat s’est tenu à l’université du MEDEF sur le thème « Peut-on faire
tourner le capitalisme autrement ? ».
Sur la recomposition des conseils d’administration et l’entrée de
nouvelles têtes (genre Védrine à LVMH ou Francis Mer à Rhodia et
Adecco), voir la page (10) du Monde du 3/8.

9) Idée communiste

Une curiosité que je me permets, immodestement, de signaler : écrivain
et critique de cinéma, figure de « Charly Hebdo », Michel Boujut a été
littéralement happé par mon livre-thèse sur Kanapa, au point d’écrire un
livre sur cette lecture, sorti ces jours ci chez Flammarion, « L’énigme
Kanapa, le fanatique qu’il faut être » ; titre et 4 de couverture sont
plutôt agressifs mais le récit, lui, est très intéressant ; par quelle
alchimie existentielle Boujut s’est senti attiré par l’histoire de
Kanapa ? Une enquête passionnante d’un intellectuel progressiste
qui a envie de comprendre l’histoire de l’intelligentsia
communiste, qui s’interroge sur le manque présent d’une force critique, sur la manière de redonner des couleurs à l’idée communiste aujourd’hui. « Un communisme de l’émancipation reste-t-il possible ? ».

10) Partis

PS : 21 octobre, premier meeting du comité Guigou, partisan du Oui, à Lyon.
Cérémonies prévues en avril 2005 pour le centenaire du socialisme.

Verts : congrès les 4 et 5 décembre à Reims

UMP : voir l’article de J Jaffré dans Le Monde, 1/9, sur sa mauvaise
image dans l’opinion (et le choix risqué de Sarkozy).

Article sur l’organisation des jeunes UMP in Le Figaro du 3/8

Europe : longue tribune de Philippe Herzog dans Le Figaro-Economie du 30
août pour le OUI à la Constitution européenne.

*Mouvement des idées*
Note n°83 (9/9/04)

1)Opinion ouvrière déprimée

Sondage CSA/La Tribune : le moral des citoyens au plus bas. 64%
pessimistes sur l’économie, le plus mauvais résultat depuis 1996.
Ce qui souligne aussi la vanité du discours sur la reprise ! Que 33%
d’optimistes ( 36% il y a un an).
73% des ouvriers pessimistes, 49% des cadres.
En fait d’un côté les Français sont un peu plus confiants sur les grands
indices économiques mais plus inquiets sur leur situation
individuelle !Pour Rozes, c’est le résultat des annonces contradictoires
de Raffarin.
Ils attendent beaucoup de l’Etat et peu du pouvoir
Délocalisations, emploi, questions majeures.
Sur les 35h, des Français divisés : 47% contre 46 !
60% des cadres pour des sacrifices salariaux, 37% des ouvriers.
Confirmation du scepticisme général sur la réforme de l’assurance
maladie ( tous les sondages de cet été vont dans ce sens : on ne croit
pas la réforme Douste efficace).
Voir aussi le sondage CSA/La vie, 3/9 : chute de confiance des ouvriers
à l’égard du pouvoir.

2)Antilibéralisme dans les têtes, inaction dans les faits

Plusieurs papiers, surtout à droite, montrent que si l’idée libérale
s’affiche un peu partout, l’antilibéralisme est (reste) fort
(majoritaire) dans les têtes. Un papier étonnant par exemple de F.
Lenglet in Enjeux/Les Echos (3/9 ) : « Rarement le débat économique aura
été autant obscurci par les peurs qu’en cette rentrée 2004. C’est tout
le bestiaire menaçant qui peuple nos esprits(…) : le « patron voyou »qui
délocalise l’emploi, « l’ultra-libéral » qui sabote l’Etat providence,
le chinois et son dumping social… ».
( Dans le même ordre d’idées, observons la place prise par des films « 
politiques » sur le Che ou Allende en cette rentrée).
Et dans le même temps nombreux papiers sur la non résistance dans les
faits ; articles sur « l’immobilisme de la CGT »(Les Echos du 3/9), sur
les incertitudes des alter-mondialistes…(ou sur le revirement de Lula au
Brésil).

3)Un capitalisme sans projet ?

Cette idée a été lancée par le bulletin d’information de la Caisse des
dépôts et consignations ; elle est reprise par « la correspondance
économique » puis, en édito intérieur, par le Figaro économie ; ces
observateurs notent en effet la différence de tonalité entre les indices
économiques globaux, qui parlent de relance, et ceux des grandes
entreprises, parfaitement indifférentes à cette relance.
On fait remarquer qu’en fait les grandes firmes du cac 40 sont de plus
en plus déconnectés du territoire national ( que 35% du chiffre
d’affaire et 35% des effectifs, hors banques).
D’autre part , on serait dans ces groupes en panne d’idées
d’investissement ( d’où aussi les redistributions massive d’argent aux
actionnaires) ; bref « le capitalisme serait momentanément à court de
projets » (Figaro, 3/9).

4) Comment les idées viennent à Sarkozy

Papier complaisant mais intéressant du Monde, « Comment les idées
viennent à Sarkozy », (3/9) sur l’entourage de Sarkozy, ses liens avec
Bouyghes, sa manière de butiner les idées, ses convictions, son
atlantisme. Des idées arrêtées et un solide opportunisme , une capacité
à masquer des lignes de force par des « mesurettes » qui font écran.

5)Droite : refondation doctrinale

Les premières pistes sur un aggiornamento doctrinal de la droite en voie
de « décomplexification ».
Politique économique et sociale ouvertement libérale ; défaire les 35h ;
moins de protection sociale ; admission de l’utilité des inégalités
Plan sociétal : le modèle américain, les discriminations positives,
Mœurs : une tendance libertaire de droite (?) à la Madelin. Fallait
accepter tout de suite le PACS, dit Sarkozy.
Politique extérieure : réflexes réactionnaires (Turquie), réel penchant
atlantiste.
En même temps hommage appuyé de Sarkozy à Blair : il faut, dit-il,
s’inspirer « de ce que la gauche anglaise a eu le courage de mettre en
œuvre ».
On notera que François Ewald, ancien gauchiste devenu « l’intellectuel
de service » du MEDEF ( dixit Seillères à l’Université d’été) est le
président du conseil scientifique de la fondation de l’UMP.

6)Les sociologues des possédants

Beau portrait dans le supplément du monde du 4 septembre des « 
Pinçon-Charlot », ce couple de sociologues qui pistent les bourgeois
depuis trente ans.
Leur conviction : « La classe possédante est la seule qui existe encore
réellement en tant que classe c’est à dire en ayant conscience de ses
limites et de ses intérêts collectifs en étant mobilisée en permanence
pour sa survie ».
Un article de Michel Pinçon dans La Croix du 3/9 sur les raisons pour
lesquelles les riches s’affichent plus volontiers aujourd’hui (moins
peur d’être vus ; accréditer le thème de l’ascenseur social…).

7) Blairisme décortiqué

Le blairisme si volontiers invoqué par la droite française, par Lang qui
semble retrouver du charme au leader travailliste est décortiquée par un
universitaire français résidant à Londres, Philippe Marlière, dans une
tribune du Monde du 7/9. Il montre : l’opposition de gauche à l’œuvre au
sein même des travaillistes (un tiers des députés contre la Constitution
européenne) ; la législation anti-droit de grève héritée de Thatcher et
inchangée ; la chasse aux droits ouvriers ; les tensions du New Labour
avec une nouvelle génération de syndicalistes critiques ; le libéralisme
pur et dur de Blair-Macshane (son ministre des affaires européennes) :
flexibilité, durée du travail, retraite, privatisations, atlantisme…
Le nombre d’heures travaillées excessif, leur faible productivité
(moindre qu’en France ou Allemagne)

8)Calendrier socialiste

La presse a rendu publics les premiers préparatifs de l’élaboration du
projet socialiste pour 2007. Une commission de 180 responsables,
chapeautée par un « comité informel de pilotage ».
Dix groupes ( ou enjeux) : société éducative ; solidarité ; travail ;
croissance ; développement durable ; République ; libertés ; territoire ;
international ; outre mer.
Chaque groupe piloté par deux binômes homme-femme : couple de présidents
et couples de rapporteurs.
Calendrier en quatre temps :
D’ici à janvier 2005, diagnostic de la société, questionnaires des
citoyens, présentées aux secrétaires de section
Janvier/ juin : questions de société, votes des militants.
Automne 2005 : questions économiques et sociales.
Décembre 2005 : texte soumis au militants lors d’un congrès extra ou
d’une convention.
Un « journal » rendrait compte des différentes étapes.

9) Inégalités sociales

Deux papiers intéressants. « Revenus : qui est riche, qui est pauvre ? »
in Alternatives économiques (3/9), rappelant notamment que un ménage sur
deux a moins de 1800 euros par mois.
Et « les inégalités sociales à Paris », une enquête de l’INSEE dont
parle Le Monde du 9/9.

10) Partis

Fondations : enquête sur les quatre fondations in Enjeux/Les Echos du
3/9 ( revue de presse hebdo)

*Mouvement des idées*
Note n°84 (16/9/04)

1)Image dégradée des Etats Unis

Sondage de Gallup Europe qui montre la dégradation de l’image des Etats
Unis en Europe, le fossé entre les opinions de part et d’autre de
l’Atlantique. Voir Le Figaro et Le Monde du 10/9. On peut consulter sur
_www.transatlantictrends.org <http://www.transatlantictrends.org/> _
Une petite campagne de réhabilitation du modèle US, par exemple le livre
d’Yves Roucaute (!) « La puissance de la liberté »(PUF), soutenu par
Rioufol du Figaro : « Roucaute fait partie de ces rares auteurs français
qui refusent les récitations contre Bush et qui défendent sa stratégie
de la force face au fascisme musulman ».
Ou encore ceux d’Adler (Odyssée américaine) ou de Guy Sorman ( Made in
USA). Voir leur débat in Le Figaro du 6/9.
Si les questions de politique intérieure viennent assez peu dans la
campagne, on retiendra le projet de Bush de faire « une société de
propriétaires », où chacun sera encouragé à posséder son logement, sa
retraite, sa santé, sa sécu…

2)Séquelles en France

Ce regard critique, cette envie de distance avec Washington ne sont pas
sans influence sur le débat politique français. A droite par exemple,
Sarkozy joue ou laisse dire qu’il joue, la carte américaine et
répète volontiers que l’opinion ici serait globalement atlantiste.
Papier de Libération du 14/9 sur l’impact persistant du modèle
américain. L’ex ministre Philippe Briand parle des Américains comme « 
des grands maîtres de la communication politique ». A l’UMP, on dit
vouloir s’inspirer des kermesses électorales américaines pour la
prochaine présidentielle : côté spectacle, mise en scène du côté privé
du candidat. Et en finir avec « les réunions de quartier et les meetings
sous les préaux ».
Arnaud Montebourg de son côté retient certains thèmes de la campagne
Kerry : remise en cause du libre échangisme ; délocalisations.
Un autre papier souligne que Fabius qui enseigne à l’occasion aux Etats
Unis a été surpris du poids pris dans le débat public par les
délocalisations, d’où –aussi- son insistance sur ce thème dans son
argumentaire européen.

3)Débat européen

Les termes du débat sont en train changer. D’un côté on reconnaît, un
peu mieux, qu’on peut être européen et anti-construction actuelle (
cette question figure désormais dans certains sondages par exemple) ;
mais d’un autre côté un contre-feu très fort est lancé, et s’affirme de
manière assez cynique l’idée que « l’Europe » (actuelle) ne peut
s’accommoder que d’une recette libérale.
C’est le cas de la longue chronique économique de Eric Le Boucher dans
Le Monde du 12/9. Titre : « Peut-on faire l’Europe sociale ? Réponse :
non » ; il vilipende la prétention française au « social », « un Etat
obèse menacé d’impuissance qui vit d’une fiscalité record ; il n’y a
guère que les Français orgueilleux et bien peu lucides pour y voir un
modèle »…

4)Pression, rapport et propagande ( sur le temps de travail)

Pression maintenue sur la question des Français au travail avec
l’annonce du rapport Camdessus, ex patron du FMI et membre de la
Fondation UMP (!) qui remettra son rapport à Sarkozy.
Obligé d’admettre que la productivité du salarié français par heure
travaillée est supérieure à celle de l’Américain (5%) mais dans sa vie
il produirait 36% de moins qu’aux USA.
On trouve aussi là une volonté de dramatiser, d’inquiéter l’opinion pour
mieux faire passer des « réformes » ultralibérales. A lire de ce point
de vue l’échange étonnant entre Serge Dassault et la rédaction du
Figaro, publié dans le Monde du 9/9. « On ne travaille plus, on ne dit
pas la vérité aux Français ».

5)Privatisation de l’Etat

La question est abordée ces jours ci sous plusieurs angles.
Le Figaro publie (10/9) les 230 mesures soumises par les ministres au
comité présidé par Francis Mer sur la réforme de l’Etat.
Le social-libéral Bernard Spitz, ombre portée de l’ex ministre
socialisant Roger Fauroux, détaille dans ce même numéro une vision
sociale-démocrate de cette réforme et donne en exemple :la suppression
du statut de la fonction publique en Italie ; les réformes suédoises,
néerlandaises…Par rapport à ces exemples il trouve qu’il y a à Bercy 100
fois trop (cent) d’agents !
Enfin dans le supplément Monde/Emploi (14/9, p VI), un recensement de
tous les contrats de sous-traitance et d’externalisation.
Voir aussi Renaud Dutreil in Les Echos du 14/9. Et Alain Etchegoyan sur
le plan dans le même journal, le 15
La nomination de Séguin à la Cour des comptes semble s’inscrire aussi
dans ce mouvement.

6)Psychotropes et malheur de la société

Dossier sur la croissance des ventes des antidépresseurs, anxiolytiques,
somnifères in Le Monde du 7/9 .
Commentaires du docteur Zarifian, psychiatre : « Le généraliste ( en
France) joue un rôle psychosocial, un rôle de soupape de sécurité de la
société. S’il ne la jouait pas, il y aurait des désordres sociaux
beaucoup plus importants. (…) C’est un produit à traiter les malheurs de
la société ».

7)Ecole

Bon papier du Monde sur l’Ecole où il pointe « la nostalgie d’un ordre
scolaire disparu » : livre catastrophe de Marc Le Bris ; téléréalité de
M6 « Le pensionnat de Chavagnes » ( et campagne de presse sur les vertus
de l’internat) ; discours conservateur de F. Fillon.
Le quotidien donne la parole à Hervé Hamon, auteur de « Tant qu’il y
aura des élèves »(Seuil) : « les gens ne savent plus à quel point
l’école des années 50 était brutale, bricolée, peu performante ».
A lier à la publication prochaine du rapport Thélot dont le Monde croit
pouvoir dire qu’il va entraîner « une rupture du système éducatif » (16/9).
A relire le dossier du Monde du 5/9 : » La taille des classes peut être
décisive pour la réussite des élèves ».
Voir encore l’étude du Monde sur les noms des établissements scolaires
(2/9) où l’on sent la force d’une culture progressiste : le nombre
d’établissements Moulin, Curie, Jaurès, Langevin, Hugo, Eluard, voire
Louise Michel (129 !).

8)Délocalisation

Rapport de l’ONU montrant que les multinationales exercent dans les pays
du tiers monde un « chantage à l’emploi » pour réclamer l’absencede
toute contrainte (Libération, 14/9).
Les USA « découvrent aujourd’hui ce phénomène que l’Europe a vécu dans
les années 90 » (Le figaro, 14/9).
L’économiste JL Levet parle d’ »un début de désindustrialisation en
France » (Libération, 14/9).

9) UMP : une doctrine plus radicale

Pierre Méhaignerie qui devrait voisiner avec Sarkozy dans la nouvelle
équipe dirigeante de l’UMP précise longuement dans le Monde du 2/9 les
contours de l’UMP. Concernant sa doctrine économique, il écrit ceci qui
nous éloigne du traditionnel discours chiraquien : « La diabolisation du
libéralisme par la gauche (et seulement la gauche française) ne fait que
dénoter la pauvreté de la pensée politique actuelle. L’UMP n’a rien à
gagner à s’enferrer dans un tel débat. John Rawls nous rappelle que
l’économie n’est pas un jeu à somme nulle : les gagnants ne gagnent pas
au détriment des autres mais peuvent au contraire contribuer à les faire
gagner plus. Certaines inégalités peuvent être économiquement efficaces
et légitimes si, et seulement si les différences de richesses servent à
augmenter les espérances des plus pauvres ».

10) Partis

PS : sondage à paraître ce jeudi du Point : 61% approuvent la position
de Fabius (contre 32) ; 73% des sympathisants PS. (Et le oui à la
Constitution ne recueillerait plus que 51% !).

UMP : papier du Parisien du 15/9 sur les divisions à droite à l’occasion
des sénatoriales.
Surenchère (dans la ligne Seillères) des ultralibéraux sur le pouvoir et
l’UMP (35h et fonction publique ; service minimum) ; voir la longue
interview de Madelin dans Le Figaro du 14/9, pro Sarkozy, anti Chirac et
très sceptique…

Référendum : Le Point du 2/9 (p 7) parle de sa préparation par le
pouvoir ; vers une rédaction simplifiée du texte de la Constitution en
deux pages ; le vote par internet à l’étude ; Raffarin songe à un comité
national de personnalités (droite-gauche) « chargé d’animer le débat »…

*Mouvement des idées*
Note n°85 (23/9/04)

1) La société française a peur

Le JDD du 19/9 fait grand cas (il en fait son édito) d’une « enquête sur
la société française » d’Euro RSCG. A paraître prochainement.
Un constat : l’inquiétude, la peur, la menace, le risque, la
victimisation seraient partout, dans toutes les têtes. Le rapport parle
de « société de défiance généralisée ». Et de « crise du collectif liée
à la perte des dogmes fondateurs et de valeurs communes » ; les valeurs
républicaines seraient un slogan vide, « uniquement rappelé dans des
circonstances graves comme la canicule ou dérisoires comme les JO ».
D’où un besoin de surprotéger.
Ici le rapport ( et le JDD) pointe le bout de son nez pour :

1.

promouvoir l’idée libérale ; il est dit en effet que le fait de
protéger casse « la créativité, contrepartie naturelle du risque »
 ; ou encore qu’« en France l’incapacité à agir se solde par la
volonté d’empêcher les autres d’entreprendre » ;

2.

en appeler, face à des individus isolés, déboussolés, à un homme
fort : « il manque quelqu’un pour entraîner, pour dire comment
vivre ensemble »

3.

nourrir une petite musique antidémocratique ; par exemple, dans le
chapitre « la crise des référents », il est fait état d’une perte
d’influence de l’ « élite » mais aussi d’une « crise de la
connaissance » : « si une majorité pense quelque chose, cela
devient vrai » se plaint le rapport et le journal peste contre le
poids « de la rue », « la dictature du bar-tabac et du
micro-trottoir ».

2)La peur et la démocratie

Cette question de la peur est également présente dans l’intéressant
entretien du philosophe Patrick Viveret in Mouvements du 17/9 ( voir
revue de presse hebdo)
Il parle de « la crise de la substance même du fait démocratique » et
pointe la contradiction « entre une socialisation croissante des
nouvelles forces productives liées à la mutation informationnelle » et
des « rapports sociaux émotionnels, très en deçà de cette socialisation
et structurés par la peur, voire la panique » .
Parle de « polarisation régressive », de résistance des forces de vie (« 
si nos sociétés fonctionnaient conformément au modèle présenté par le JT
de 20 heures, la réalité serait encore bien plus grave ».
Il évoque la crise de l’altermondialisme, revient sur le thème gramscien
de « bâtir des éléments d’hégémonie culturelle avant de chercher la
conquête du pouvoir politique ».

3)Individu et mouvement social (suite)

Considérations intéressantes de Philippe Corcuff dans Libération (20/9)
sur marxisme et individualisme ( cf citations des Manuscrits de 1844) ;
morale de son papier : » Au nom d’une vision erronée, autosuffisante et
égoïste de l’individu, les prophètes néolibéraux saperaient les bases
concrètes sur lesquelles l’individualisme contemporain a pu se
développer et donc menaceraient les fragiles acquis de l’autonomie
individuelle. D’où la nécessité de nourrir la critique sociale d’une
double référence aux solidarités collectives et à l’individualité ».

4)Capitalisme et démotivation salariale

Enquête réalisée par un cabinet de conseil Towers Perrin, auprès de 15
000salariés de six pays européens, dont les résultats sont publiés dans
La Tribune du 17/9. Il en ressort qu’une proportion importante de
salariés « n’y croient plus » ; les managers eux mêmes seraient démotivés
et la performance des entreprises fragilisée.
Seulement 15% des salariés européens sont motivés dans leur travail. Les
autres, l’immense majorité, se retranchent dans le « pourquoi s’embêter
à se donner du mal » de ceux qui suivent le mouvement ou le « de toute
manière le chèque arrive en fin de mois » écrit le journal.
Qui parle aussi de « destabilisation d’un salariat de confiance : les
cadres ».

5)Libéralisme à la caricature

Dans une tribune du Figaro du 17/9, l’universitaire Pascal Salin vante « 
la concurrence fiscale ; il reprend les clichés les plus plats : la
concurrence = la diversité= l’harmonie ; la concurrence « est un
formidable facteur de progrès puisqu’elle incite chaque producteur à
faire mieux que les autres ». Et ainsi de suite sur une demi page. On
notera le fait pour deux raisons : l’idée libérale s’affiche avec
impudeur, sans la moindre réserve, on répète un catéchisme, une
scolastique, débarrassée de tout doute, de toute précaution.
Secondement ce Salin en question est le fameux patron du jury de
l’agrégation en économie, membre d’une sorte de secte ultralibérale ( et
trans-atlantique), dénoncé l’an passé par certains syndicats enseignants.
En même temps ce « durcissement » du discours est dans le fil de la
droite sarkozyste.

6) Echos du débat économique aux USA

La presse fait (un peu) écho à des bouts de débat sur la politique
économique dans le cadre de la présidentielle américaine. Si Bush pousse
vers une atomisation ultralibérale ( vers une « société de propriétaires
 »), on note aussi une multiplicité d’échos critiques sur le libéralisme,
les délocalisations, la croissance sans emploi, la politique de santé,
l’Etat-providence… Des questions qui viennent sur le tapis non seulement
pour des raisons de justice mais « d’efficacité économique ». Comme si
une pensée antilibérale était en train de se chercher.
Fitoussi dans Le Monde du 23/9 parle de cet « étrange débat » ( à noter
que le patron de la BNP parlait lui aussi, à propos du débat sur le
marché en France, d’ « étrange débat »). Il écrit : « Le débat
(économique) aux Etats Unis fait rage » ou « L’enseignement que les
Européens peuvent tirer de ce débat, c’est la conviction que le marché
n’est pas aussi sacré qu’on veut nous le faire accroire ; son
fonctionnement, surtout s’il est dicté par la rationalité, est loin
d’être toujours adapté aux objectifs qu’il est censé atteindre. Cela,
les économistes le savent depuis longtemps mais l’air du temps semble
l’avoir oublié ».
Ici on aimerait avancer l’hypothèse suivante : et si, après la vague
libérale initiée par Reagan au début des années 80, s’ouvrait, dans les
années à venir, la perspective d’un courant antilibéral venu de l’autre
côté de l’Atlantique ? On n’en est pas là mais des signes intéressants se
multiplient.

7)Fascination des médias

Le livre « La promo » d’Ariane Chemin évoque le sort de la promotion
1986 de Sciences Po. A sa manière il montre comment cette « élite » des
temps mitterrandiens a été fascinée par les médias ; au palmarès
Frédéric Beigbeder, Isabelle Giordano, David Pujadas et elle même au Monde.
Aussi Claude Chirac, Arnaud Montebourg et JF Copé.


8) Pratiques culturelles des Français

L’INSEE vient de publier « Quarante ans de services culturels et
récréatifs » dont il ressort un désinvestissement des Français pour le
cinéma (-43%) et un triplement de leur budget télévision.
Une chute du cinéma particulièrement forte entre 1982 et 1991.
Depuis le milieu des années 90, petite relance de l’intérêt pour le cinéma.
A noter aussi l’importance prise par les jeux de hasard et d’argent. Ces
dépenses ont quintuplé dans la dernière décennie.

9) L’implosion des intégristes catholiques

Bon résumé dans Le Monde du 22/9 de l’histoire des catholiques
traditionalistes de la mouvance Lefebvre,

10) Partis

UMP : renoncerait à l’organisation de courants.

LCR : congrès avancé au 16/19 juin 2005 : revendique 3000 militants ;
aurait souscrit 270 000 euros sur 350 000.

CFDT : redécouvre les termes de « critique sociale, de « capitalisme non
régulé » selon un papier du Monde du 23/9.

*Mouvement des idées*
Note n°86 (30/9/04)

Note spéciale consacrée à l’ouvrage « * Histoire des gauches en France* »
de JJ Becker et G Candar (La Découverte), 2004.

Il s’agit d’un travail considérable : 80 contributions, deux volumes,
1350 pages. Cette somme ambitionne de faire le tour non seulement des
formations politiques de gauche mais de ses valeurs et finalement de son
identité, en permanente construction.
On évoquera ci-dessous le sommaire et, le cas échéant, les remarques
que ces articles appellent.

LIVRE I : L’héritage du XIXe siècle.

*Avant propos des deux co-auteurs * : considérations bibliographiques et
historiographiques ; parlent de l’ébranlement récent de grandes
certitudes : celle d’une évolution « progressiste » globale de
l’humanité ; ou encore le lien économique – social – culturel.
Au delà de la diversité, il y a une « attitude » de gauche, un « 
comportement » de gauche, très antagoniste de la droite. Il y a « une »
sensibilité de gauche, un peuple de gauche. Le livre tente « d’analyser
les gauches d’un même pas dans leur unité, dans leur diversité et dans
leur profondeur mentale ».
Ce travail relève « autant de l’histoire des mentalités, des
représentations, des genres ou des styles de raisonnement que de
l’histoire politique ou sociale ».
L’origine de la notion ? 1789. Si les évolutions, à droite comme à
gauche, ont été considérables, « existe toujours le combat des mêmes
contre les mêmes ».

La première partie (19è siècle) « s’interroge sur les origines de la
gauche, analyse la naissance de ses traditions, détermine ses acquis et
les débats dont deux prééminents, la question sociale et la question
nationale ».
Ou comment gauche et République se sont rapprochées sans s’identifier
pour autant : suffrage universel (masculin), grandes libertés de la
presse, de réunion, d’association, instruction pour tous, 14 juillet,
Marseillaise, drapeau tricolore…

Le second volume s’ouvre avec les débuts du Xxe siècle et une question
qui divise la gauche : l’expérience gouvernementale ! Un siècle aussi où
la gauche est interpellée par la guerre et la révolution.

1. *AUX ORIGINES DE LA GAUCHE*

*La gauche, l’idée, le mot, Maurice Agulhon.*

Pour lui il y a la droite, la gauche et la Révolution (cette dernière ne
s’identifiant pas automatiquement à la gauche ; Marx n’utilise pas les
termes de droite et de gauche mais ceux de classes sociales).

« Force est bien de constater que notre histoire est animée par au moins
deux luttes majeures : la lutte des classes suscitée par la modernité
économique et la vieille lutte ( faut-il dire philosophique ?) remontant
au moins au 18^e siècle. Et que la réalité de notre histoire se compose
de leurs complexes interférences ».

*La gauche et les Lumières, Michel Vovelle*.

Ou la gauche avant la gauche. Et son legs : la raison, le progrès, les
libertés, l’anti-despotisme.
« C’est la Révolution française qui enracine les lumières à gauche ».
De l’image respective de Voltaire et de Rousseau, des débats tout au
long du siècle. Pleine récupération par la IIIe République.
Relance récente du débat avec les mises en accusation de Rousseau (
Julliard, Furet)…

*La gauche sous la Révolution : naissance d’une notion, Michel Vovelle*.

Revient sur une étude précise de la droite et de la gauche fans les
assemblées de la révolution, le travail de politisation à l’œuvre et de
formation de partis, la place des jacobins, la géographie électorale
enfin qui installe durablement une France de gauche et une France de droite.

*Les partis de gauche pendant la monarchie censitaire, Nicolas Bourguinat*

La gauche pendant la IIe République, JC Caron

Et l’apparition des « rouges » qui mettent le social au premier plan et
entendent « soumettre le pouvoir républicain à un contrôle permanent du
peuple ».

Gauche de gouvernement, gauche parlementaire, gauche radicale.

La gauche sous le Second Empire, Sylvie Aprile

Répression, gauche modérée et émergence d’une mouvance ouvrière autonome.

*La Commune et la gauche, Jacques Rougerie.*

Comment la Mémoire de la Commune a fonctionné ? Amnistie (1879), le deuil
mué en culte, son « instrumentalisation idéologique » ; leçons tirées par
Marx : l’abolition de l’Etat, la dictature du prolétariat,
l’organisation politique de la classe ouvrière.
Distance maintenue entre la Commune et le socialisme français.
Débat sur la nature de l’Etat (ou du non Etat).
C’est en Russie que la Commune aurait eu le plus d’influence.

*La gauche en République (1871/1899), Gilles Candar.*

2.
*TRADITIONS ET SOCIABILITES DE LA GAUCHE*

*La mémoire de la Révolution au XIXe siècle, Jean El Gammal*

*La mémoire d’un bonapartisme de gauche, Gilles Candar*

*Les sociétés secrètes pendant la monarchie censitaire, Thomas Bouchet*

*Un demi-siècle d’insurrections et de barricades, Cayatte et Oulmont*

*Les clubs de 1848, JC Caron*

*Exil et exilés de gauche au XIXe siècle, S. Aprile*

*Banquets et enterrements, E. Fureix*

*La gauche, la littérature et les arts de la Révolution à 1914, P. Régnier*

3.
*COMBATS ET ACQUIS DE LA GAUCHE*

*La gauche et le suffrage universel, C. Guionnet.*

*La République, combat et acquis de la gauche, Maurice Agulhon*

*Les deux abolitions de l’esclavage, Yves Benot*

*L’instruction publique, JF Chanet*

*Un combat de la gauche : la liberté de la presse, D. Kalifa*

4.
*PROBLEMES ET DEBATS DES GAUCHES*

*La gauche et l’idée révolutionnaire au XIXe siècle, Pierre Levêque.*

Dont les chapitres « Pour une Révolution sociale. De Babeuf à la
Commune. De la Commune à la SFIO »

*La gauche et la religion, P. Boutry*

*La gauche et le progrès, A. Rasmussen*

*Les femmes et la gauche en France : entre discours émancipateurs et
pratiques de domination, M. Riot-Sarcey*

La gauche et les juifs, C. Fhima

Allusion à des parcours communistes

5.
*La gauche et la question sociale*

*Les premiers socialismes, C. Prochasson*

*L’invention du marxisme français, C. Prochasson*

*L’anarchisme, G. Manfredonia*

*Naissance d’un syndicalisme, JW Dereymez*

6.
*LA GAUCHE ET LA QUESTION NATIONALE*

*Les internationales et la question nationale, C. Weill*

*La gauche et l’idée nationale, P. Cabanel*

La gauche et l’idée de la guerre, JJ Becker

*La gauche et la colonisation, G. Manceron*

*CONCLUSION : L’homme de gauche au XIXe siècle, A. Corbin*

Données qui le caractérisent : la croyance au progrès, à l’avenir, à une
mission, à l’instauration d’un ordre nouveau ; croyance que l’histoire
est intelligible.

*LIVRE II : XXe siècle. A l’épreuve du pouvoir*

1. *Le « peuple de gauche » au cours du siècle*

*Les radicaux, Serge Bernstein*

*Les socialistes, Frédéric Sawicki*

*Les communistes, Bernard Pudal*

Où comment s’est construit le parti ; le peuple des communistes ; les
matrices idéologiques du communisme ; les « logiques de la dissociation »
depuis 1960. Reprend le thème du « déclin » : « Pour le moment, aucune
reconfiguration partisane n’a donc réussi à enrayer le processus de
dissociation de l’entreprise communiste ».
(Notons que quelques pages plus loin, l’ouvrage évoque le « renouveau »
de l’anarchisme).
Approche conformiste.

*Les syndicalistes, J Siwek-Pouydesseau*

*Les coopérateurs, Alain Chatriot*

*Ligues et associations, Emmanuel Naquet*

*Les féministes, Florence Rochefort*

*A gauche de la gauche, Daniel Lindenberg*

Historique intéressant (notamment le trotskisme et la guerre) ; l’auteur
se dit « guère convaincu » par « la perspective ouverte à l’essor de
nouvelles radicalités » ; y voit tout au plus « un contrepoids éventuel,
aiguillon ou force de dissuasion selon les cas, destiné à peser ».

*L’anarchisme au Xxe siècle, de la crise au renouveau, G. Manfredonia*

*Ecologistes et alternatifs, JP Deléage*

*Les mendésistes, Vincent Duclert*

*La « deuxième gauche », Vincent Duclert*

*Les gaullistes de gauche, Yves Billard*

2. *L’exercice du pouvoir*

*L’affaire Dreyfus et la gauche, V. Duclert*

Montre bien les débats qui traversèrent la gauche socialiste, au début,
sur cette affaire ; rappelle la déclaration du Parti ouvrier de Guesde :
« Les prolétaires n’ont rien à faire dans cette bataille qui n’est pas
la leur ».

*Blocs des gauches et gouvernements radicaux , G Candar*

*Cartel des gauches et gouvernements radicaux, Frédéric Monier*

*Le Front Populaire, F. Monier*

*Les gouvernements de gauche sous la IVé République, JP Rioux*

*Mai 68 ou la gauche à contretemps, Danielle Tartakovsky*

Montre comment en 68 – comme lors de l’affaire Dreyfus ou du combat
antifasciste- « s’est effectuée une redéfinition de l’identité de la
gauche ».
Du PC, l’auteur écrit : » Le PC espère après 68 pouvoir miser sur une
hégémonie culturelle pour développer une stratégie nouvelle et tenter de
s’opposer au renversement engagé ru rapport des forces. Dans une
perspective gramscienne implicite ( sensible dans sa politique
éditoriale), la culture doit être constitutive de sa stratégie et être
la condition de la politique à laquelle il aspire ».
Mais c’est le PS qui récupère les aspirations de 68 :
décentralisatrices, antiautoritaires, pragmatiques…

*L’Union de la gauche et l’ère Mitterrand (1965/1995), A Bergounioux, G
Grunberg *

Trente ans d’histoire, « qui ont profondément changé la gauche »,
surtout axés sur Mitterrand dont « la boussole fut avant tout la
recherche et la conservation du pouvoir », d’où l’utilisation des
institutions, le souci d’ « être le moins contraint possible », ce qui
explique « qu’il n’ait jamais voulu imprimer une cohérence idéologique
et doctrinale au socialisme français pour redéfinir son identité dans
une période pourtant nouvelle ».
Ou encore
« Sa volonté de contrôler le PS était plus forte que son souci d’assurer
le renouvellement de l’idée socialistes.

La gauche plurielle (1995/2002), JJ Becker

On retiendra deux choses de cet article. D’abord cette évidence : « Il
est rare que la gauche au pouvoir n’ait pas été désignée par une formule
– bloc des gauches, cartel des gauches, front populaire, union de la
gauche, gauche plurielle-, preuves s’il en est qu’il n’a jamais existé « 
une » gauche mais bien « des » gauches et que, chaque fois ou presque
qu’une gauche a gouverné, elle a eu besoin d’être aidée par une autre ou
des autres gauches ».
Puis il montre assez bien les critiques communistes, dès 1997-98, à
l’égard de Jospin.

*La gauche, la nation et les guerres*

*La gauche et la grande guerre, JJ Becker*

Ou comment la guerre a « anesthésié » la gauche radicale, troublé le
mouvement ouvrier et fait passer la France à droite.

La gauche et l’héritage de la grande guerre, Annette Becker

Où comment la guerre de 14/18 est « pour les gauches un passé qui ne
passe pas ». Et notamment la permanence communiste ( depuis la chanson
de Craonne, 1920, Vaillant Couturier, p 338) contre la guerre.

La gauche et l’empire colonial avant 1945, E. Sibeud

On retiendra l’anecdote : c’est en Algérie, à Constantine, en 1927, et
dans la bouche d’Albert Sarraut qu’apparaît la paraphrase de la formule
de Gambetta : » Le communisme, voilà l’ennemi ».

*Les gauches, l’antifascisme et le pacifisme pendant les années 1930, S.
Wolikow*

Idée : « Même si l’antifascisme fut très largement utilisé à son profit
par le PC, il n’en reste pas moins que cet antifascisme démocratique a
été véritablement vécu par les larges fractions du « peuple de gauche ».
Ce qui diffuse au sein de la gauche une culture associant défense
démocratique, lutte sociale et possible guerre antifasciste.

La gauche de Munich à l’armistice, Noelline Casttagnez

Montre comment Munich fait imploser la gauche socialiste, nourrissant
les pires dérives, comment « le PCF est la seule formation de gauche
intégralement antimunichoise » ; comment le Front Popu est liquidé. Une
approche plutôt mesurée de l’attitude communiste face au pacte
germano-soviétique même s’il est dit : « Néanmoins il fallut attendre
l’attaque de l’URSS par les Allemands en juin 1941 pour que les
communistes français retrouvent clairement leur ligne antifasciste ».

La gauche, Vichy et la Résistance, Laurent Douzou

Cette question, dit l’auteur, « reste brûlante au début de ce XXIe
siècle ». Il montre l’éclatement de la SFIO sous l’occupation, la quasi
transparence de ce parti sous l’occupation ; concernant le PCF,
l’historien montre comment après la guerre, l’attention a été focalisée
de manière « non innocente » sur son attitude de 1939 à 1941. Douzou
évoque l’attitude résistante communiste dès novembre 1940, les numéros
de La Pensée, les mineurs du Pas de Calais (printemps 41)… mais parle
néanmoins d’un comportement « tactiquement habile » du PCF…

*La gauche à la Libération, JJ Becker.*

Caractérise le programme du CNR comme « très à gauche ».
La Résistance ne se transforme pas en un grand mouvement politique, car
la place est déjà prise par les partis. Il évoque les tendances
unitaires, côté PS ou PC, à la Libération. Montre que le PC change (
adhérents, électeurs…) sans changer ( appareil, CC, BP) ; le PS de son
côté bouge peu et « entre dans une maladie de langueur, une sorte de
dépression qu’il mettra plusieurs dizaines d’années à surmonter ».
Quasi élimination des radicaux durant la guerre. Si le thème de la
laïcité unifie d’abord la gauche avant guerre, celui du « progrès social
 » est devenu dominant en 1945.

La gauche et la guerre froide, Anne Dulphy

Montre comment « la sphère extérieure » conforte et amplifie des
divergences intérieures pour pousser à la rupture de mai 1947 ; comment
le PS est divisé sur la rupture ; comment, un temps (mai-octobre 1947),
le PCF refuse cette bipolarisation Est-Ouest ; comment Moscou pousse,
comment les USA financent le PS ; comment la guerre froide sera
dommageable pour toute la gauche ( perte d’adhérents et d’autorité PC,
PS et syndicats).

La gauche et la décolonisation, S. Thénault

Montre la responsabilité des gouvernements de gauche (socialistes en
fait) ; l’engagement des militants ; on souligne que les communistes sont
« pris entre deux feux : sensibles aux revendications des colonisés (…)
sans être pour autant alliés aux nationalistes ».
L’émergence d’une extrême gauche anticolonialiste.
Le rôle de P. Mendes-France.

La gauche et l’Europe, R. Franck

Un long historique qui montre entre autres : que le PCF reconnaît le
fait européen dès 1972 et la signature du programme commun ; qu’en 1978
F. Mitterrand proclame « l’Europe sera socialiste ou ne sera pas » ; le
tournant de 1983 ; les engagements européens de Mitterrand de longue date.
L’étude montre comment sur cet enjeu européen, le PC se montra toujours
uni alors que le PS se divisait : CED en 1954 ; Maastricht en 1992 ; la
tentation à gauche depuis les années 90 à s’opposer à l’Europe libérale ;
« Le PS pourrait être bloqué par l’impopularité de la dimension libérale
de l’Union. Le débat institutionnel ( à venir) risque d’accroître les
tensions au sein du PS ».
Avance l’idée que l’Europe est nécessaire pour la « mutation » de la gauche.

*LA GAUCHE, LA REVOLUTION, LES INSTITUTIONS*

*De Lénine à Marcos, modèles étrangers pour la gauche, F. Hourmant*

Ou l’appel des soviets, les tropismes tiers mondistes et le mystère
chinois, autant de rêves de « pays imaginaires » qui sont devenus un
temps « les supports des espoirs ».

*Communisme et anticommunisme, Sophie Coeuré*

Une étude originale sur un mot aussi vieux que le communisme lui-même,
sur la manière dont le parti « s’est défini presque aussi fortement par
la lutte contre ses ennemis rassemblés sous l’étiquette unique
d’anticommunistes que par son projet » ; sur l’impossible anticommunisme
de gauche tout un temps, celui de l’antifascisme (1934-1947) ; sur la
multiplication des centres critiques anticommunistes, sur leur
efficacité croissante ; sur le « triomphe » par défaut enfin de
l’anticommunisme à gauche.

*La gauche, les institutions et le gaullisme, Odile Rudelle*

*La gauche, le libéralisme politique et les droits de l’homme, Eric
Agrikoliansky.*

« Les discours de gauche à propos des droits ne peuvent être décrits à
travers un schéma simple et linéaire et c’est une histoire heurtée,
faite de renversements et parfois de contradictions qu’il faut tracer ».
Humanisme républicain et radicalisme révolutionnaire ; sur la popularité
du thème de l’Etat de droit.

*La gauche et l’Etat, Olivier Baruch*

Poids du jacobinisme de 89, de l’échec de 1848 et du besoin de conquête
de l’Etat.
La « réflexion » communiste sur l’Etat (545).
Le poids du modèle bonapartiste.
De la multiplicité des doctrines de gauche sur l’Etat au glissement de
ces doctrines confrontées au pouvoir.
La gauche utilise l’Etat plus qu’elle ne le réforme.
De la démocratisation de la fonction publique ; la formation des hauts
fonctionnaires ; la politisation des nominations.
« Gouverner autrement » ?
« A l’issue d’un siècle où elle a largement détenu les responsabilités
du pouvoir, la gauche semble avoir renoncé à la triple ambition -
transformation, modernisation, démocratisation- dont elle était porteuse
en matière de rénovation de l’Etat. Il n’est guère surprenant en
conséquence que la question de l’Etat apparaisse aujourd’hui comme une
forme d’impensé de gauche ».

*La gauche et la prise du pouvoir, Philippe Buton*

En fait une longue réflexion sur le mythe du « grand soir »et la manière
dont, au long du siècle, « la perspective de la prise du pouvoir est
délaissée au profit des conquêtes partielles de multiples pouvoirs afin
de transformer ici et maintenant une réalité perfectible sans attendre
la table rase d’Eugène Pottier ou la feuille blanche de Mao ».

Les gauches et l’économie, P. Frindenson

Papier sans relief ; on retiendra que l’abandon par la CFDT
de l’idée d’autogestion coïncide avec le virage européen du
PS : 1983.

*Mai 68 dans la pensée, Michel Feher*

Long papier sur le legs de 68, l’importance de ce débat persistant, les
différences d’interprétation : « promesse d’une révolution sans guide ni
protocole, ébauche d’un champ de batailles politiques réfractaire à tout
horizon, affirmation d’une société civile allergique à la
représentation, émergence d’un individualisme imbu de son
irresponsabilité ou encore instrument inattendu de la réhabilitation du
capitalisme ».
Question centrale selon l’auteur : le sujet, entre normes et autonomie,
un thème qui aurait contribué à « l’effacement des socialismes ».

*LES CULTURES DE LA GAUCHE*

*Le marxisme au Xxe siècle, Daniel Lindenberg*

Papier plus de polémiste que d’historien sur le discrédit,
l’indifférence, l’oubli voire l’ « inutilité » d ‘ « un « marxisme
analytique en France ». Marx remplacé par Foucault.

*Anticléricalisme et laïcité, J Lalouette*

La gauche, les mœurs et la morale, C Prochasson

Intéressant sur les rapports compliqués entre les gauches et la morale,
l’histoire communiste notamment, les évolutions contemporaines avec « 
l’installation définitive de l’individu au centre du projet social ».

*Arts, culture et intellectuels de gauche au Xxe siècle, F. Matonti*

La naissance des intellectuels avec l’affaire Dreyfus ; l’engagement ;
liens avec les partis ; ; actions spécifiques ; les politiques culturelles.
S’interroge sur « la fin des intellectuels ».

*Travail et loisirs, Marion Fontaine*

La question du temps libre et des loisirs est « consubstantiellement
liée à la gauche ». Droit à la paresse ; 1936 ; Tourisme et travail ; les 35
heures.

CONCLUSION

*L’Homme de gauche au XX é siècle, JJ Becker*

L’homme de gauche a meilleure réputation que celui de droite ; il a
pourtant eu une vie difficile.
Au début, il n’est pas seulement républicain et démocrate, il est
dreyfusard, anticlérical ; l’idéal ? Le radical.
Puis, la question sociale aidant, vient le républicain socialiste ; puis
le syndicaliste-révolutionnaire : trois sensibilités du début du siècle.
Arrive la gauche nationaliste.
Leur ralliement à la guerre. Les séquelles, la scission de 1920 « jamais
résorbée », « un moment décisif pour l’histoire de l’homme de gauche au
Xxe siècle ».
Extrême violence de la division. Et des espoirs de réunification.
Quasi-disparition du terme de gauche sous la guerre froide.
Relance du processus unitaire par le PCF au début des années 60.
Et ses développements.
« Toutefois un élément imprévu : chaque fois que communistes et
socialistes se rapprochaient, le PC en sortait renforcé et le PS
affaibli. Là c’était le contraire.
Recomposition « structurelle » de la gauche. Affaiblissement communiste.
L’extrême gauche.
Le combat recommencé des mêmes contre les mêmes ? Oui et non. Non car
l’homme de gauche s’est complexifié ; que l’idée de révolution aurait
cessé de fonctionner
« mais le grande changement est peut être que la conduite des affaires a
montré que l’opposition frontale entre le progrès et la conservation
n’existait pas dans la réalité »
Frontières plus floues droite-gauche mais « l’opposition est toujours
proclamée, elle existe », toujours une opposition progrès/conservation.
"Il est une loi de l’Histoire que les représentations sont infiniment
plus durables que les réalités qui les ont fait naître mais comme
l’Histoire n’est pas immobile, que sa marche donne même l’impression
d’être de plus en plus rapide, les turbulences qui affectent l’homme de
gauche ne sont que le reflet de la nécessité pour lui de devoir en
permanence renouveler et redéfinir son identité. N’est-ce pas en
définitive la leçon que donne la lecture de ces deux siècles d’histoire
des gauches ? ».
Au total, un travail stimulant qui rappelle que :

1)contrairement à une campagne régulièrement relancée, droite et gauche
structurent la vie française depuis près de deux siècles ;

2)il y a « des » gauches (même si certains articles l’oublient) ; et la
place du parti est globalement reconnue. Les animateurs de la rédaction
de l’ouvrage se félicitent de la diversité des collaborateurs
sollicités. C’est exact, même si on retrouve là d’abord la famille
socialisante (et sciences-po) de l’école historique actuelle.

3)l’ouvrage est faible dans l’analyse des nouvelles formes de
contestation à gauche aujourd’hui, sujet plus délicat à aborder pour des
historiens ; il laisse ouvert les perspectives de développement à gauche,
contrairement à certaines thèses sur le déclin inéluctable d’un côté ou
l’hégémonie indiscutable de l’autre. Les deux co-animateurs écrivent
dans la préface, évoquant le « très contemporain » (2202 et 2004) : Nous
serons prudents, « nous laissons à d’autres le soin de « faire bouillir
les marmites du futur » ou de feindre de croire que des directions
uniques s’imposent à l’humanité et a fortiori à la gauche française en
ce début de XXIe siècle ».



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