3 décembre 2013

Au bord de l’eau

« En Allemagne, les sociaux-démocrates sont en plein désarroi idéologique » : ce titre récent du journal Le Monde laisse songeur. L’information était dans l’air, n’empêche qu’elle ébranle un des fondamentaux de la gauche européenne. Pendant 50 ans, il a été dit et redit que SPD, lui, avait réussi son aggiornamento, qu’il était l’exemple à suivre pour tous les socialistes d’Europe et d’ailleurs, les Français en particulier ; que son fameux congrès de Bad-Godesberg était le St Graal pour tout le mouvement progressiste, LE programme universel, l’idéologie parfaite, le modèle d’arrangement avec le marché, un marché libre et non faussé, impliquant l’abandon du marxisme, l’alignement sur l’éthique des dominants, la répudiation de toute idée de nationalisation, le communisme définitivement voué aux gémonies. Cette social-démocratie bad-godesbergée était la crème du modernisme, débarrassée de toutes les foutaises rouges, séquelles d’un 19è siècle qui ne voulait pas lâcher prise. Et patatras, voilà qu’on nous annonce que ça ne marche plus, que le joujou est cassé. Le sous-titre de l’article disait : « Le SPD s’apprête à gouverner avec Merkel mais pourrait s’allier à la gauche radicale en 2017. » Pourquoi diable ça fait penser à ce proverbe africain : « Assieds toi au bord de l’eau, tu verras passer le cadavre de ton ennemi » ?

Gerard Streiff


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